RDC : Le secteur artistique franchit un cap décisif avec l’officialisation du statut de l’artiste

Kinshasa, 24 juin 2025 — Un tournant majeur vient d’être amorcé dans l’histoire culturelle de la République Démocratique du Congo. La Première ministre Judith Suminwa Tuluka a signé, lundi 23 juin, le décret fixant le statut de l’artiste et des métiers culturels. Une mesure très attendue par les professionnels du secteur, qui marque une étape cruciale vers leur reconnaissance institutionnelle et leur intégration dans l’économie nationale.

Une avancée juridique majeure

Fruit d’un long processus entamé en mars dernier au Conseil des ministres, le décret est le prolongement des réformes portées par la ministre de la Culture, des Arts et du Patrimoine, Yolande Elebe Ma Ndembo. Il ambitionne de donner aux artistes un cadre professionnel structuré, avec pour objectifs :

  • l’amélioration des conditions d’exercice des métiers artistiques ;
  • l’accès à une protection sociale et à la formation continue ;
  • et l’intégration formelle du secteur culturel dans l’économie nationale.

Le texte instaure également une logique de responsabilisation, en encourageant les artistes à participer au système fiscal via un régime adapté, tout en bénéficiant des droits et protections afférents.


Un cadre légal inédit depuis l’indépendance

La promulgation de ce décret complète l’ordonnance-loi sur la culture adoptée en mai 2025. Ensemble, ces textes forment désormais un socle juridique cohérent, réclamé depuis des décennies par les acteurs du monde culturel congolais. « C’est une reconnaissance attendue de longue date, et un signal fort envoyé à toute la communauté artistique », confient plusieurs responsables syndicaux interrogés à Kinshasa.


Que prévoit concrètement le texte ?

Le décret adopté apporte plusieurs éléments structurants :

  • Une nomenclature claire des métiers artistiques et professions culturelles officiellement reconnus ;
  • Des droits garantis, incluant les droits d’auteur, les droits voisins, et les protections contractuelles ;
  • Un accompagnement institutionnel, par le biais de formations et de mécanismes d’adhésion aux organismes de gestion collective ;
  • Des dispositifs de régulation, afin de fixer des standards professionnels et garantir un niveau minimal de qualité.

Un levier pour le développement économique et l’image du pays

Au-delà de la simple reconnaissance professionnelle, cette mesure est également perçue comme un outil stratégique dans la consolidation du soft power congolais. Le gouvernement espère ainsi projeter une image culturelle forte de la RDC à l’international, tout en stimulant les retombées économiques internes.

Les autorités tablent notamment sur un élargissement de l’accès aux financements, publics et privés, ainsi qu’une meilleure structuration des circuits de revenus artistiques, aujourd’hui largement informels.


Une mise en œuvre progressive, mais cruciale

Pour garantir l’impact réel de ce décret sur le terrain, plusieurs conditions sont jugées prioritaires :

  • la création d’instances spécialisées comme un observatoire du secteur culturel ;
  • la généralisation de formations continues à l’intention des artistes et gestionnaires ;
  • la participation active des syndicats et organisations professionnelles ;
  • un suivi rigoureux des effets à court et moyen terme.

Un cadre promu par la volonté politique

Pour Me Glody Muabila, secrétaire général de l’ADACO (Administrateur des droits d’auteur au Congo-Kinshasa), il s’agit d’un moment historique :

« Ce décret pose enfin les bases juridiques d’un secteur longtemps laissé en marge. Il est le fruit d’une volonté présidentielle affirmée de structurer la culture comme pilier de développement. Le défi désormais, c’est sa mise en œuvre effective. »


À travers cette avancée réglementaire, la RDC s’aligne sur les standards internationaux de gouvernance culturelle et offre, pour la première fois, un statut clair et protecteur à ses artistes. Une reconnaissance juridique qui pourrait bien amorcer une nouvelle ère pour la création congolaise.

La Rédaction

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